Alors évidement, on voit que c 'était déjà un progrès sur le premier temps de son enseignement où, dis ons , la conclusion de l'analyse ne jouait que sur le moins phi (-φ) Lacan a d'abord conçu la conclusion de l'analyse comme une conclusion ontologique (si je puis dire), débouchant sur le manque à être, débouchant sur ce qu'il appelait l'horizon déshabité de l'être , en conclusion de son article sur la Direction la cure. Ou encore débouchant sur la division, la Spaltung du sujet c'est-à-dire encore son manque à être et donc sur un dernier mot qui est néant, qui est rien, et sa rhétorique a habillé cette conclusion ontologique et lui a donné une splendeur à laquelle je fais allusion sans essayer de vous en citer des morceaux ni de la reproduire ici.
Alors, le progrès de la traversée du fantasme est le suivant: il conserve l'idée de ce que j'appelais la conclusion ontologique, il a parlé à ce propos de désêtre et je me souviens comme ce terme à l'époque avait la propriété de stupéfier ses auditeurs alors que ce terme ne faisait que redire d'une autre façon ce que Lacan avait dit de façon plus poétique quand il parlait du manque à être ou de l'horizon déshabité de l'être. Quand il s'agit de la conclusion qu'il conserve, la conclusion appelée traversée du fantasme, nous conservons ce que Lacan a pu dire du désêtre et de la déflation du désir dans laquelle on aperçoit que le désir n'est qu'une métonymie du manque-à-être, une révélation, et c'est ça la révélation ontologique, c'est la révélation du désêtre, mais elle complétée, si je puis dire, d'une conclusion existentielle qui est marquée petit a et qui est une positivité de jouissance, qui est une jouissance instante, existente, qui attache le manque-à-être du sujet, qui l'attache à l'existence et si j'en vient maintenant au sinthome, que je vise avec cette rapide reconstruction, avec le sinthome on peut dire que on bascule du côté existentiel. D'où nous voyons maintenant le re lief de l'enseignement de Lacan, on s'aperçoit qu'on est passé du manque-à-être à cette conjonction du manque-à-être et à ce que j'appelais la conclusion existentielle et puis que décidément (... ?) avec la consistance clinique du sinthome, il bascule de l'autre côté.
Au fond, d'emblée Lacan avait admis que la vérité avait structure de fiction par rapport au réel, et il se satisfaisait que l'analyse se tienne au niveau de la structure de fiction et qu'il opère dans la fiction. Et au fond le mal était, parce que le mal même était au niveau de la fiction. C'est la même chose mais vue de l'autre côté qui advient ave le sinthome: le réel ex-siste à la fiction. Au regard du réel, la fiction est une vérité menteuse. Toutes ces affaires d'être, c'est-à-dire d'identifications et de désêtre sont, au regard du réel, une vérité menteuse parce qu'il y a une jouissance qui ne se laisse pas négativer. Il y a une jouissance qui n'est pas dans le registre ontologique qui est un registre de fiction. Et dès lors, on peut dire que jusqu'au sinthome, Lacan a toujours considéré le réel à partir du signifiant. Et s'il nous dirige ensuite dans son dernier enseignement, dans ce que nous en faisons depuis lors, c'et à considérer le signifiant à partir du réel. Voyez d'où Lacan est parti: l'inconscient est vérité. Et ça oriente la pratique dans le sens de l'interprétation jusqu'à ce que Lacan ait formulé, ait donné le privilège à la formulation «l'inconscient est savoir» et qu'il ait définit l'inconscient à partir du sujet supposé savoir.
Alors là aussi cette formulation, qui est contemporaine de ses constructions sur le fantasme, voyez comme cette expression elle-même, il y a quelque chose d'hybride dans cette définition. D'un côté, à définir l'inconscient comme savoir et non pas comme vérité, on met l'accent sur le fait que l'inconscient est fait de signifiants, de matériel signifiant, qu'on voit sortir au fur et à mesure que se poursuit l'analyse. Mais en même temps , le terme de supposition fait bien voir que nous restons dans l'ordre de la fiction ; c'est-à-dire ce savoir matériel néanmoins n'est pas réel, il a un statut de fiction comme celui que Lacan assignait à la vérité et donc si on voulait – il m'est arrivé souvent d'expliquer cette formule du suje t supposé savoir et de m'en servir – j'aperçois ici vraiment son caractère hybride et donc Lacan pouvait dire quedanslapasse,ilyaun évanouissement du sujet supposé savoir corrélatif du désêtre, que de la même façon qu'il y a désêtre il y a le dévoilement de l'inessentiel du sujet supposé savoir c'est-à-dire le dévoilement de la négation de cette essence et de ce sens du sujet supposé savoir.
Alors la bascule à laquelle Lacan n'a pas pu donner une expression à la mesure de la nouveauté que cela comportait puisque, finalement, il ne l'a dit absolument en clair qu'une seule fois, entre parenthèses. La bascule, c'est de considérer l'inconscient comme réel, c'est: l'inconscient est réel. Et ça, c'est un nouveau concept de l'inconscient, dirais-je, un concept qui inclut le ça, pour le dire de la façon la plus simple. Il se sert désormais du terme d'inconscient pour unifier l'inconscient et le ça, et c'est pourquoi, par exemple, il pouvait dire dans Télévision que le nœud que un symptôme, c'est un nœud de signifiants donc pas le retour d'une vérité refoulée et qu'il est fait d'un nœud qui se construit – je le cite – réellement – voyez pages Autres écrits (pages 516, 517) d'un nœud qui se construit réellement à aire chaîne de la matière signifiante, chaîne non de sens mais de jouis-sens. Dieu sait si j'ai déjà épinglé ce terme de jouis -sens. Mais si je le traduis en terme freudien, c'est la conjonction de l'inconscient et du ça. Et l'énorme, c'est que Lacan pouvait déjà dire dans Télévision – je le cite – c'est le réel qui permet de dénouer le symptôme.
Je me demande comment on est passé si vite là-dessus parce que c'est énorme, l'idée qu'on puisse opérer avec le réel, que le réel puisse être un moyen de l'opération analytique. Et donc cette même bascule se c onstate, cette même bascule qui est là marquée par l'implication décidée de la pulsion dans le symptôme se constate aussi quand Lacan disons efface progressivement le terme de sujet qui appartenait par excellence à l'ordre signifiant, et le remplace, voudrait le remplacer par le terme de parlêtre. Évidemment, le sujet est disjoint de la pulsion tandis que le parlêtre inclut le corps et il dit: voilà le nom qui remplacera celui d'inconscient. Donc au fond tantôt Lacan dit l'inconscient est réel ou tantôt – comme l'inconscient réel c'est vraiment autre chose que l'inconscient freudien, eh bien il propose à l'occasion de le remplacer – sans aller jusqu'au bout bien entendu – il évoque qu'on pourrait le remplacer par le terme de parlêtre incluant le corps et c'est cohérent avec la notion du jouis- sens, que il n'y a pas de sens qui aille sans jouissance et donc il n'y a pas de signifiant, il n'y a pas de désir qui ne soit connecté à la pulsion, etc., et la racine de l'Autre c'est le Un. Vous voyez à travers – là je parcoure plusieurs années du dernier enseignement de Lacan, mais c'est comme une nébuleuse et nous trouvons là les indices qui nous permettent de voir dans quelle direction pointe sa dernière perspective.
Alors le parlêtre c'est celui qui de parler, en quelque sorte superpose un être au corps qu'il a, il superpose un être à l'avoir et son avoir essentiel c'est le corps. Le parlêtre c'est aussi le «n'a qu'un corps»; si je puis dire. Alors dans tout ça; il y a une dévalorisation du signifiant, de la valeur de vérité et l'idée qui modère l'idée de la puissance signifiante. Il considérait, par exemple, la façon énigmatique dont Lacan entame son séminaire du sinthome. Et je vais essayer de faire sens de l'apologue qu'il présente au début puisque il évoque la création divine, la création dite divine, et l'histoire des noms qu'il serait demandé à Adam de donner aux espèces animales et ce qu'il met en valeur c'est: la bactérie n'est pas nommée. Et bien ça, ça veut dire qu'il y a des existences qui n'ont pas des noms, qui n'ont pas de signifiants et qui n'en sont pas moins du réel. C'est Lacan qui avait exalté dans son enseignement la puissance créationniste du signifiant. Bien entendu, puisque que le signifiant est ce qui accouc he d'entités qui ont structure de fiction. Et donc Lacan exaltait au contraire el pouvoir de création de signifiant qui s'exerce ex nihilo, à partir de rien. Là où il n'y a rien, le signifiant fait être quelque chose. Et en particulier, il fait être la vérité. Et bien nous avons ici l'envers de décor, nous avons au contraire quelque chose qui a existence sous les humbles espèces de la bactérie et à quoi on ne daigne pas accorder la nomination.
Et on a cru d'ailleurs, à cette date, que Lacan exaltait la nomination, la fonction de la nomination alors que, tout au contraire, il évoque la nomination pour montrer qu'elle est sa distance avec le réel. C'est dans ce contexte qu'il peut dire que la création dite divine se redouble de la parlotte du parlêtre, ce qui implique, ce qui impliquerait, parce que nous sommes là au niveau d'un apologue, qu'il y a d'abord le réel et que s'ajoute ensuite, se surajoute le signifiant et que donc cet apologue de début de Séminaire du Sinthome illustre la primarité du réel; et c'est avec le signifiant qui commencent les embrouilles, les embrouilles du vrai, les embrouilles du désir, les embrouilles de l'interdit, les embrouilles de l'Œdipe , parce qu 'à la racine, le signifiant vient percuter le réel, il vient percuter les corps. Et chez le parlêtre, ce choc initial, ce traumatisme introduit une faille qui est aussi bien le phallus, qui est aussi bien la faute, le péché ou, dit Lacan - en prenant la première syllabe de sinthome, sin-en anglais le Sinn, le péché. Et la faille, cette faille initiale tend à s'agrandir toujours, sauf, dit-il, à subir le cesse de la castration. Et donc ce qu'il appelle ici castration, c'est ce qui ferait cesser le sinthome, c'est ce qui ferait que ça puisse s 'écrire dans un discours ce qui ne sera pas du semblant mais qui serait du réel. C'est le nouveau sens de la castration: ce qui fait cesser les embrouilles du sens. En effet ici Lacan introduit, Lacan qui avait célébré la fonction de la parole, introduit l'instance de l'écriture comme essentielle à la pratique d'analytique. La différence est que la parole porte de sens tandis que l'écriture rejoint le non-sens. Et c'est pourquoi il faut radicalement distinguer le signifiant et la lettre. Le signifiant effectue le signifié tandis que la lettre est matière. Et donc Lacan nous dirige dans ce sens d'un certain forçage des limite s de l'analyse. Dans le champ du langage, il y a plus que la fonction de la parole, il y a l'instance de l'écriture. Et Lacan sait si bien que c'est un forçage qu'il n'hésite pas ici, pas avant, c'est avec le symptôme qu'il s'affirme comme hérétique dans psychanalyse, en se préposant d'être hérétique de la bonne façon. Mais sans doute a-t-il été discret la dessus puisque hérétique, on l'a dit déjà pendant vingt ans, dès qu'il a commencé à ouvrir la bouche. Eh bien tout le temps qu'on le disait hérétique, Lacan, lui, se considérait comme freudien. Et c'est ici, en effet, que lui-même évoque son hérésie. Quelle est bonne façon d'être hérétique dans la pratique psychanalyse? Il en donne la formule qui est à méditer: la bonne façon est celle qui, d'avoir bien reconnu la nature du sinthome, ne se prive pas d'en user logiquement c'est-à-dire d'en user jusqu'à atteindre son réel au bout de quoi il n'a plus soif. (page quinze du Séminaire du Sinthome).
C'est un appel à la nature de sinthome dont il s'agit d'atteindre le réel. Il ne s'agit pas d'atteindre sa vérité mais c'est la notion que le sinthome est du réel, que ce n'est pas un retour du refoulé, que ça ne s'apaise pas avec de la vérité, que ça ne s'apaise pas avec du sens, comme Freud s'en était bien aperçu en ayant sur les bras les restes qu'il appelait les restes symptomatiques de ses patients; et c'est ce qui le conduisait à dire: bon, après un petit temps de latence, on attend cinq ans et puis on s'y remet et puis il y aura des restes symptomatiques. Alors Lacan passe à la limite en disant: il y aura toujours des restes symptomatiques parce qu'il est de la nature de la jouissance de résister au sens. Il a une jouissance qui tient au corps, qui se produit dans le corps. Alors on peut dire évidemment, ça se produit aussi dans la pensée, on peut penser au symptôme obsessionnel, c'est un symptôme dérivé, si j'ai le temps, j'y viendrai plus tard, on a parlé de ça justement à Montpellier. Le symptôme est du réel et il appelle du sens, il suscite du sens, il susc ite l'interprétation aussi bien du patient que de analyste. Et c'est à ça que Freud, dans son orthodoxie, a succombé et c'est ce qu'il fait qu'il a découvert l'inconscient parce que les hystériques, du sens, elles lui en ont donné a ras bord, en veux-tu, en voilà! Bien sûr qu'il faisait des séances longues, qui étaient encore trop courtes pour lui, si je puis dire, parce qu'il attendait la suite. Elles devaient lui dire: non non; ça, je vous le dirai demain.
C'est là où Lacan... j'essaye de donner de l'éclat à cette hérésie. L'hérésie, c'est cette mise à distance du sens s'agissant du s inthome et au fond autant la psychanalyse que Lacan implique comme orthodoxe fourni t du sens, autant cette psychanalyse hérétique sèvre le patient de sens. C'est, au moins, une pratique qui correspond au temps de l'outrepass e ou l'analyste à affaire aux restes symptomatiques quand le sujet ne s'en est pas satisfait. Et à ce moment là, l'analyse devient, en effet, un sevrage de sens. Et Lacan était tellement convaincu que le sens, alors, pouvait être peu indiqué ou dangereux, que lui a été arrivé – il lui est arrivé une fois – d'évoquer la nécessité d'une contre psychanalyse après fait une analyse. La contre psychanalyse, étant entendu qu'elle aurait visé justement à ce nettoyage du sens que j'évoque ici.
Alors il parle d'usage logique du symptôme et il s'agit, en effet, d'une pratique orientée par le mode logique. Il ne faut pas s'imaginer que le hors sens, c'est la nuit noire. Quand Lacan situe le sinthome comme du réel hors sens, c'est au sens où la logique procède hors sens, qu'elle formalise, qu'elle pose ses axiomes et qu'elle déduit hors sens c'est-à-dire en opérant dans un champ du langage nettoyé de la signification. Vous trouvez ça déjà dans l'écrit de Lacan qui s'appelle L'Étourdit, la connexion de la logique et du réel quand Lacan écrit: la logique est la science du réel. Ces affinités de la logique et du réel sont à l'oppos é des affinité s de la philosophie et de l'être. Le hors sens qu'il évoque, c'est le hors sens qui est le résultat de nettoyage du champ dont on exclut la signification pour manier la lettre. Cet hors sens, donc, ce n'est pas simplement: on se cogne partout, on ne voit rien, on ne peut rien en dire mais il a y, au fond, possibilité d'une articulation. Que Lacan, dans son tout tout dernier enseignement, soit venu à douter de cette articulation elle-même, c'est un autre chapitre. Ici, je me tiens à ce que ça me suggère de la deontoligation la pratique analytique qui suppose – l'hérésie, ça n'est pas de quitte r le champ du langage, c'est d'y demeurer, mais en se réglant sur sa partie matérielle, c'est-à-dire sur la lettre au lieu de l'être. Il est été arrivé à Lacan de jouer au contraire sur les affinités de la lettre et de l'être, sur les assonances; dans son article qui s'appelle L'instance de la lettre, il en joue. Mais c'est tout au contraire, dans la période de sa réflexion que j'évoque, il passe par le mot lituraterre – littérature transformé comme je l'ai dit, pour faire valoir la lettre comme litura, comme déchet et donc pour l'arracher à ses affinités avec l'être. Le réel du sinthome que Lacan nous propose dans cette phrase d'atteindre, dis ons que c'est la pure percussion du corps par le signifiant, par la parole. C'est ainsi d'ailleurs que Lacan définit à cette occasion el s pulsions comme l'écho dans le corps qu'il y a un dire.
Ce thème de la résonance est familier à Lacan puisque dès son premier texte Fonction et change de parole et du langage il l'introduit, et d'ailleurs comme le titre de sa troisième et dernière partie page deux cent quatre vingt neuf des Écrits «Les résonances de l'interprétation». La notion de résonance est là d'emblée mais au début de l'enseignement de Lacan, elle est pris e dans une poétique du langage. Alors qu'ici, il s'agit d'un usage logique. La percussion, elle nécessite pour retrouver la percussion initiale il s'agit d'un usage logique qui serait capable de tarir le sens, de couper de souffle. Lacan l'évoque à propos de Joyce dont il dit qu'il coupe le souffle du réel, qu'il coupe le souffle du rêve de la littérature. avec son Finnegans wake qui est écrit dans une langue personnelle, qui joue de toutes les assonances et il dit que c'est à cette occasion que Joyce a mis au jour le sens du symptôme littéraire.
Autrement dit la littérature rêve et Joyce, avec son roman d'assonance, montre de quoi elle est fait matériellement. Et en nous montrant de quoi elle est faite matériellement, il la réveille. Il la réveille pour qu'il finisse, pense Lacan. La littérature ne pouvait se soutenir que de son rêve, que de ne pas savoir de quoi elle était faite. Et bien ce qui est à l'horizon que dessine Lacan – j'irai jusque là, moi je le situe dans l'espace de l'outrepasse – c'est de mettre en jour le sens du symptôme psychanalytique. C'est-à-dire de quoi est fait une psychanalyse. C'est ça qui vient au premier plan dans l'outrepas se, de quoi est fait votre attachement à la psychanalyse? À la jouissance de la psychanalyse.
La aussi il y a rêve qui implique, qui appelle un réveil qui ne se fait pas sur modèle de 'leffet de vérité. Pour cela, il faut suivre Lacan dans ce qu'il nous indique, et c'est là-dessus que convergeait le séminaire du Sinthome, je l'ai montré à Montpellier, dans une atmosphère de rigolade qui n'est pas la notre ici! J'ai montré que la pratique que Lacan nous indique où qu'il peut nous permettre d'inventer, où qu'il peut nous permettre de théoriser quand c'est la notre, passe par une désublimation qui n'épargne pas la théorie psychanalytique et qui décape sa pratique de son orientation vers la vérité et même de son adoration de la vérité, une pratique qui vise au serrage du réel du symptôme. Au fond nous avons eu l'exemple d'emblée à Montpellier a propos de – j'avais cueilli comme ça des phrases cliniques de Lacan et j'avais obtenu celle-là d'abord – arracher l'obsessionnel à l'emprise de regard. Ça ne va pas de soi qu'on puisse dire que ce soit là l'essentiel. On dirait dans psychanalyse qu'il s'agit de l'idéal du moi, de l'instance qui surveille et qui juge. On évoquerait l'Homme aux rats qui, à un moment crucial de sa jouissance, s'en va s'ouvrir la porte pour voir si son père n'est pas là. Au fond, ce que Lacan indique au contraire, c'est que le père, le grand I de l'idéal du moi, au fond ce sont des fictions. Ce sont des fictions qui permettent de méconnaître ce qu'il y a à la racine qui est la présence de regard. Le réel de symptôme obsessionnel, ce n'est pas le père. Ce n'est pas l'idéal du mois. Le réel de symptôme obsessionnel que Lacan nous invite à atteindre, c'est le regard. L'idéal et le père sont dérivés du regard. C'est dans ce sens que Lacan peut dire que la vérité est sœur de la jouissance, sœur cadette, c'est-à-dire qu'elle vient après et qu'il y a d'abord la jouissance, ce qui vraiment inverse l'ordre sublimatoire dans lequel l'orthodoxie psychanalytique, y compris la lacanienne, nous a appris à penser.
La théorie analytique, c'est une sublimation de sens. Et c'est pourquoi Lacan faisait appel à une pratique sans vérité. On a rencontré ça dans son tout dernier enseignement et je vois mieux maintenant ce que ça veut dire.
Une pratique sans vérité, c'est une pratique sans la fiction de la vérité, sans la fiction des univers aux, c'est une pratique désublimée. Alors quand on proposait à la fin de l'analyse la sublimation comme idéal, voire devenir écrivain, devenir artiste, c'était aussi au nom d'une idée de l'art que Lacan conteste dans son séminaire du Sinthome en montrant que l'art, à travers exemple de Joyce, il montre précisément que l'art a sa racine dans son réel et lui-même de l'ordre du sinthome. C'est la idée que Lacan avait de Finnegans wake que Joyce avait l'écrit pour lui-même et que el fait qu'il l'ait publié n'a llait pas de soi et que c'est parce qu'il avait des mauvaises intentions, c'est parce qu'il avait l'intention de couper le sifflet aux autres écrivains, et d'en finir avec la littérature. Qu'est-ce que ça veut dire ça? C'est que Lacan ici nous invite à traiter l'œuvre d'art elle-même, cette œuvre écrite, à partir de la pulsion, à partir, si je puis dire, de la pulsion scriptuaire. Qu'elle est à entendre dans l'auto-érotisme du parlêtre. De la même façon, c'est dans ce Séminaire que Lacan réduit, désublimise le père en disant que le père n'est qu'un symptôme. Et c'est pourquoi il parle de perversion. Il a de l'ironie bien sûr, puisque le père est suppos é, dans la psychanalyse orthodoxe, être le support de normal et que Lacan fait entendre ce qu'il comporte de pathologique. Mais ce aussi dire que du père il n'y a que des versions, que l'essence qu'on appelle le père et précisément le nom du père, qui a été isolé par un certain orthodoxe qui s'appelait Lacan Jaques, eh bien que précisément le père n'existait pas. Dans la pratique de la psychanalyse il n'existe que des pères, singuliers. Au fond la désublimation, la chute des idéaux et des universaux, elle a commenc é pour Lacan a partir de la sexualité féminine, lorsqu'il a pu dire: La femme n'existe pas, il y a des femmes, eh bien, de proche en proche, il l'a étendu a toutes les catégories et en particulier de celle du père. Mais c'est dans le même esprit qu'il peut dire que «le vrai – c'est aussi une phrase que j'avais proposée à Montpellier, de Lacan – le vrai, ça fait plaisir» et qui, bien sûr, fait déchoir le vrai de sa qualité d'effe t de vérité pour montrer en quoi il est une affaire de libido. C'est la tension majeure de notre pratique entre logique et libido. Dans les dernières phrases que j'avais fait commenter, il y a celle-ci de Lacan et qui s'entend mieux sur le fond différence entre la psychanalyse orthodoxe et l'hérétique.
«L'analyse, dit-il, est une réponse tout spécialement conne, à une énigme». Et, bien entendu, c'est la psychanalyse comme orthodoxe qu'il vise là. Elle est toute spécialement conne dans son esprit – voyez là-bas, ça fait rire tout le monde, ici personne, parce que nous sommes des austères – c'est que précisément, l'analyse orthodoxe essaye de rép ondre à l'énigme sexuelle par un effet de vérité, par un: que la lumière soit, par une élucidation, alors qu'il s'agit, au contraire, d'atteindre ce que la jouissance comporte d'opacité irréductible et c'est àl ce que vise l'hérésie lacanienne.
On a pu croire que l'Autre, c'était l'Autre de la parole, l'Autre du désir et Lacan a construit son grave sur cet Autre, et il a même pu situer à côté des formations de l'inconscient le fantasme de la traverser. Évidement, on opère dans un tout autre cadre quand on admet que l'Autre, c'est le corps, qui n'est pas ordonné au désir mais qu'il est ordonné à sa propre jouissance. Que ce réel, Lacan a voulu lui donner la forme boroméenne, on peut en prendre acte, il n'empêche que au cœur, là ou se coincent les cercles, le ronds boroméens, il y a toujours à placer un prélèvement corporel et je vous en ai donné un exemple avec ce regard dont j'ai montré à Montpellier comment on pouvait le retrouver dans nos différentes structures cliniques.
Ce sera publié, Montpellier, les travaux de mes collègues, la discussion et donc n'en dirai pas davantage aujourd'hui en vous donnant rendez-vous à la semaine prochaine.