Жак-Ален Миллер , курс 2010-2011 гг
Бытие и Одно // Совсем Одно
14 сеанс, 25 мая 2011

Жак-Ален Миллер, курс 2010-2011 гг
Бытие и Одно // Совсем Одно
14 сеанс, 25 мая 2011
Ce n'était pas ici que mon cours de cette année a atteint – quoi? son but, sa cible, son sommet? Comme j'ai employé trois mots, si vous en perdez un, ce n'est pas trop grave. Ce n'était pas ici mais lors de la journée d'étude à laquelle vous n'avez pas été conviés – je m'en excuse – qui réunissait comme chaque année ceux qui ont une charge d'enseignement dans les Sections cliniques, celles de France, à laquelle s'ajoute la Section de Bruxelles. Cette journée regroupe donc un aréopage de quelques deux cent enseignements et un petit nombre d'étudiants qui sont aussi conviés, pas les parisiens. Et ce week-end, cela se passait à Montpellier et je ne peux pas le passer sous silence, non pas pour vous désespérer mais parce que non seulement ces deux demi journées ont été l'occasion pour moi de vérifier que j'étais entendu, par beaucoup de monde qui n'est pas ici, que j'étais compris et que mon Cours de cette année avait résonné pour mes collègues, des praticiens en même temps qu'enseignements qui se dévouent à animer c e qui doit bien faire vingt cinq ou vingt six établissements a travers le pays. Mais aussi, ce fut le moment où, pour moi, s'est noué le point de capiton de ce Cours.

Dans ces journées je ne suis pas du tout le seul à travailler, puisque que ces journées se sont déroulées à partir d'un écrit de quinze contributions brèves, de deux ou maximum trois pages de quinze psychanalystes auxquels j'avais proposé à chacun une proposition, une phrase, extraite du séminaire XXIII de Lacan, Le Sinthome. Je m'étais efforcé d'assigner à chacun le travail qui me semblait, les connaissant, le plus apte à les stimuler. Le résultat est là. La lecture des textes est faite à l'avance – il est aujourd'hui aisé d'envoyer cette quantité de signifiant par message électronique – ce qui fait que sur place, on converse. On a conversé dans trois tables rondes, plus une où le sujet, le thème a été laissé à l'improvisation. Donc, loin d'être tout seul, solitaire à cette tribune comme je suis ici, et comme on m'a même dit, austère, eh bien dans ce cadre la, je m'en donne mon cœur joie. Je peux dire que, pour ma part, je ne me suis exprimé que dans un style de rigolade qui a été communicatif, ce qui fait qu'on s'est bien amusé. Ca m'a fait d ailleurs regretter le format d'expression auquel je suis ici condamné, c'est le mot qui me vient et j'aimerais bien que ca change, peut être même avant la fin d'année. Il y a dans l'échange, dans la conversation, pour moi, une stimulation de l'invention extemporanée qui évidement, ici, me fais défaut. Et c'est la que le signifiant et le signifié se sont rejoints dans ce qui m'a paru être le point capito n sur ce Cours.

Le point capiton, c'est une notion que rend nécessaire le décalage, précisément du signifiant et de signifié. Au fur à mesure qui se déroule une chaine signifiante qui est, en l'occurrence, une chaine sonore, il se forme une nébuleuse de significations, jusqu'à un moment où le signifié vient s'ordonner, du moins on l'espère et semble rejoindre en quelque sorte l a suite signifiante et révéler ce que ça veut dire. Il y a, évidement, des degrés dans le ce que ça veut dire. On peut comprendre une signification sans avoir du tout la notion de pourquoi cela a été dit et ou est-ce que cela mène. Et puis ce moment de capitonnage se produit en fait avec chaque mot chaque proposition, chaque phrase, chaque paragraphe au bout de l'heure de cours et puis aussi, ensuite, on espère qu'il se produise pour l'ensemble de ce qui a été dit sous le même chef. Et cet ensemble peut encore s'élargir jusqu'à ce se demander, comme il m'arrive parfois de me poser la question, ce que veut dire l'effort que je poursuis ici depuis de nombreuses années. Autrement dit, le point de capiton, c'est une notion nécessaire, vu le décalage signifiant-signifié, pour situer ou s'imaginer situer l'intention de signification qui semble avoir été à l'origine du discours, l'intention qui aurait mobilisé le signifiant. Pour l'auditeur, cet après coup, une fois que c'est dit, peut s'imaginer accéder à cette intention, mais – imaginer que cela puisse ne pas être moins vrai pour le locuteur lui-même et qu'il est très sûr de ce qu'il veut dire avant de l'avoir dit. L'intention perçue après coup, par lui-même, peut être assez distincte de la nébuleuse d'intention qui présidait à sa prise de parole.

Vous savez comment Lacan a représenté cette fonction du point de capiton, par un schéma dynamique qui place sur un vecteur, on peut dire chronologique, la suite signifiante et qui fait intervenir un second vecteur recroisant le premier en deux points et allant en sens inverse de celui du signifié qui attende que soit déjà atteint une certaine longueur sur le vecteur signifiant pour s'effectuer, et lui n'est pas chronologique mais plutôt instantané.

Le point de capiton, c'est un instant, un instant de voir ou de saisir le signifiant qui compte, et cet instant de voir ou de saisir se collabe immédiatement avec le moment comprendre, ce qui incite Lacan à situer ici l'ensemble signifiant A, c'est l'ensemble des signifiant et à placer l'après coup là où se situe l'intention, le signifié de cet ensemble de signifiants. Vous savez que c'est de cette cellule minimale, que Lacan a utilisée à l'occasion pour représenter la métaphore, un signifiant effectuant un effet positif de signifié représenté par un S (+) s entre parenthèse dans cette formule.

C'est aussi de cette cellule qu'il a fait la matrice de son graphe dit du désir où pendant plusieurs années, il a repéré à la fois la théorie et la pratique de la psychanalyse.

Eh bien à Montpellier, et au moins pour l'ensemble de ce que j'ai voulu dire jusqu'à présent, Montpellier a fonctionné – en avais-je l'intention ou pas ? sans doute que je l'avais puisque c'est moi qui ai choisi ça il y a déjà un an, peut- être que je ne savais pas encore exactement dans quel contexte cela s'inscrirait, en tout cas ça a fonctionné comme un point de capiton pour l'ensemble de ce que j'ai dit cette année, et il faut donc que je vous en communique quelque chos e, au moins les fondements parce qu'ici, on ne rigole pas, c'est un fait, quand on compare avec le week-end, mais c'est tout de même ce que je fais ici dans un style plus laborieux qui permet au feu d'artifice de mes amis et moi-même de partir pendant un petit moment.

La dernière fois, je vais y venir, et précisément ici, c'est de reconstituer une certains table d'orientation, je vous ai la dernière fois présenté une tripartition de la cause Lacanienne. Eh bien je vais en énoncer une autre, de tripartition. Si je veux inscrire le Sinthome comme un point d'arrivée de la clinique de Lacan, je l'ai déjà identifié à ce titre, une fois que Lacan a émis son Yadl'Un, une fois qu'il a réduit le symbolique à l'Un, une fois qu'il a renié décidément l'ontologie pour la logique, et à cause de la logique, (il a fait ça, ça a lieu dans son Séminaire Ou pire, ça se poursuit dans son célèbre Séminaire Encore, Séminaire XX , c'est avec le Séminaire XXIII que nous avons la formulation du terme autour duquel tourne sa dernière clinique.

Des deux derniers Séminaires de Lacan, le XXIV et le XXV, son tout dernier enseignement, que j'ai épelés devant vous jadis, il ne se dégage pas une consistance clinique aussi opératoire que celle du Sinthome. Donc c'est le terme clé , et pas tellement glosé par Lacan, de la clinique à laquelle il a abouti et de celle qu'il a pu transmettre. Il a transmis quelque chose ensuite dans ses deux derniers Séminaires et puis dans les deux derniers qui sont hors de la série, qui viennent après le séminaire XXV intitulé Le moment de conclure, ou il était aux prises directement avec son architecture de nœuds. J'étais loin de négliger tout ça, tout au contraire, mais du point de vue clinique, tout de même, c'est avec la consistance du Sinthome que nous nous trouvons avoir à savoir faire, à voir ce que nous en développons. Alors qu'est ce qui occupe la même place avant? Qu'est-ce qui occupe, dans l'enseignement de Lacan, la même place de consistance clinique sur laquelle l'analys te repère son opération? Eh bien avant le Sinthome, – je place là en troisième – nous avons ce fantasme dont la traversée est supposée représenter être, faire exister la conclusion de l'analyse, et j'ai même pris cette issue comme programmée et recherchée par Lacan de nombreuses années avant qu'il ne l'ait délivrée.

2) Fantasme

3) Sinthome

Et encore avant, parce qu'il y a un avant, ça n'est pas venu d'emblée, cette mise au premier plan de la consistance du fantasme, encore avant, nous avons un ensemble, une classe de consistance clin ique que Lacan a baptisé une formation de l'inconscient et à quoi d'ailleurs il a consacré un Séminaire qui porte ce titre et au cours duquel il a précisément commencé à élaborer son graphe du désir dont je rappelais tout à l'heure le premier étage où la cellule matricielle.

1) Formations de l'inconscient

2) Fantasme

3) Sinthome

Donc si on prend l'enseignement de Lacan à partir de fonction et champ de la parole et du langage au moment ou lui-même date son enseignement, ses six premiers Séminairesindiquent à l'analyste que son opération porte et vise les formations de l'inconscient. C'est ensuite que progressivement il en vient à centrer la conclusion de l'analyse sur le fantasme. Ensuite, la seule consistance clinique nouvelle qui apparaît, c'est celle du sinthome. Évidemment c'est une construction de ma part, il y a bien d'autres façons de scander l'enseignement de Lacan que celle- ci et moi même j'en ai essayé un grand nombre. Mais, si je peux accréditer le terme de consistance clinique, alors il me conduit à cette répartition.

Allons vite: Les formations de l'inconscient. Vous savez ce que c'est, la plus glorieuse, celle à laquelle Freud s'est d'abord consacré et par laquelle il a forcé les portes de l'inconscient, c'est le rêve et ensuite c'est le lapsus, l'acte manqué, le mot d'esprit dans ses rapports à l'inconscient, comme il l'a écrit, et Lacan dans son enseignement a répété cette chronologie de Freud, c'est-à-dire les ... Fonction et champ de la parole et du langage, c'est une reprise à l'endroit, pas à l'envers comme il l'a évoqué, c'est une reprise à l'endroit des premiers ouvrages de Freud . C'est à l'envers parce qu'il met en valeur qu'il s'agit essentiellement du champ du langage. Alors c e sont des consistances qui sont à déchiffrer dans lesquelles une vérité est supposée être chiffrée, où une vérité est supposée être présente mais dissimulée, ce que l'on appelle refoulée et, b ien sur, on tente d'expliquer les raisons de ce refoulement. Et cette vérité se laisse traduire. Et lorsqu'elle est révélée et traduite, elle apparaît être celle du désir. Au moins Lacan l'a simplifiée dans les termes du désir, et c'est là que s'exerce par excellence l'interprétation. Je ne rappelle cela que pour mémoire et pour déjà souligner que ce que l'on appelle avec Lacan le fantasme, quand nous lui donnons cette place cruciale dans la conclusion de l'analyse, que le fantasme, je le souligne, n'est pas une formation de l'inconscient dans la mesure ou le fantasme implique aussi ce que Freud a nommé le ça.

Alors en parlant de l'inconscient et en parlant du ça, nous faisons appel à deux moments éloignés dans le temps, de la construction de Freud. L'inconscient appartient à sa première topique, le ça, la topique où il distinguait l'inconscient, le préconscient et le conscient, tandis que le ça appartient à la tripartition du ça, du moi et du surmoi. Mais c'est justement le propre de l'enseignement de Lacan que d'avoir combiné des termes qui appartiennent à des moments distincts de la construction freudienne et le fantasme tel qu'il nous a formés à le repérer c'est à la fois une formation de l'inconscient et une production du ça. Mais il ne répond pas au même régime que les formations de l'inconscient proprement dites, et c'est bien pourquoi ce fantasme, Lacan l'a introduit dans un séminaire qu'il a appelé La logique du fantasme, c 'est-à-dire qu'il a inventé un régime propre pour cette néoformation qui est aussi une production du ça. Et le régime propre à cette consistance clinique, il l'a appelée logique, terme nouveau à faire son apparition dans le champ clinique et qu'il retiendra ensuite s'agissant du sinthome. Autrement dit à cette occasion, là, déjà le terme de logique fait son apparition en même temps que le ça vient compléter ce qui était purement et simplement il complète son schéma de l'ordre de l'inconscient.

Fantasme logique + le ça

Et cette logique du fantasme telle que Lacan la présente, on peut en suivre tous les détails, ça m'est arrivé, là je me contente de dire qu'elle est faite de disjonctions et de conjonctions de l'inconscient et du ça et complété du ça, le fantasme, à la différence de formation de l'inconscient, n'est pas seulement question de vérité de désir mais aussi de pulsion et de jouissance. Pulsion et jouissance. Et c'est un fait que pulsion et jouissance, dans l'abord pur des formations de l'inconscien t sont des termes sinon totalement absents du moins extrêmement minorés. Donc, singulièrement, dans la construction clinique du fantasme, nous avons cette paire pulsion jouissance qui vient en parallèle à la paire vérité désir. Vérité désir vont ensemble et mêmes sont faits de même bois puisque les deux sont traitées comme des effets de signifiants. Et quel effet de signifiant? Eh bien l'effet de signifiant qui s'appelle le signifié. Désir et vérité sont des modalités du signifié alors que la jouissance est très indifférente à la vérité. Elle tient au corps, elle est chevillée au corps, au point que Lacan en viendra à définir le corps par la jouissance, et plus précisément, comme je l'ai accentué cette année, par sa jouissance, qu'on appelle traditionnellement dans le freudisme l'auto-érotisme. Ne croyez pas qu'il suffit de dire ça puisque Lacan a étendu ce caractère auto-érotique en tout rig ueur à la pulsion elle-même. Dans sa définition lacanien ne, la pulsion est auto-érotique. Le dire, c'est déjà suspendre tout qui avait pu être articulé d'aventureux à propos de l'objet de la pulsion. Si objet de la pulsion il y a, il est à resituer a partir de l'auto-érotisme de la pulsion que Lacan a mis en valeur, pas simplement dans la formule dont il pourrait avoir fait son profit, tirée de Freud que la pulsion orale, c'est la bouche qui s'embrasse elle-même, mais qu'il a mis en scène, avec son schéma qui figure dans Séminaire XI, de la pulsion comme faisant un aller – retour.

Alors on a, chez les lacaniens, tellement fait c rédit à Lac an qu'on a répété son schéma sans percevoir que ce schéma comportait précisément l'auto-érotisme de la pulsion et c'es t pourquoi Lacan peut dire qu'ici l'objet, ce n'est que le moyen de la voix de retour de la pulsion sur elle-même et donc que c 'est essentiellement ici une place vide qui peut être occupée par des objets divers, voire ce que Freud appelait l'Erzatz.

L'objet, c'est ici seulement le piquet qui marque le moment ou la pulsion fait demi-tour. C'est une représentation de ce que Lac an énoncera plus tard – peut-être pour qu'on comprenne mieux – que le corps se jouit, indiquant une réflexivité de la jouissance. Alors ce jalon est évidemment essentiel pour bien distinguer dans l'ordonnancement de la pratique le désir et la pulsion. Le désir, c'est le désir de l'Autre. Voilà une formulation que Lacan a donnée d'emblée, qu'il a illustrée spécialement par le cas de l'hystérique, par sa structure, mais qui appartient essentiellement à la définition du désir. Là, vous impliquez le désir quand vous mettez en évidence une relation essentielle avec une instance d'altérité avec un partenaire, avec un autre sujet dela parole.

Donc la liaison du désir et de l'Autre est une liaison essentielle, quelle que soient les configurations précises que cette liais on peut prendre dans les différentes structures, comme on les appelle. En revanche la pulsion, c'est la pulsion de l'un. Au niveau de la pulsion, l'instance de l'Autre n'a pas du tout la présence, l'instance qu'elle a dans désir. C'est bien ainsi qu'on l'entend, la pulsion – que Lacan disait acéphale - on peut dire aussi que là, ce n'est pas seulement l'Autre qui ne n'y est pas mais le sujet de parole lui-même; sur le vecteur de la pulsion, on ne s'aperçoit pas forcément que l'autre n'est pas d'accord. Ça peut avoir des conséquences tragiques... Ce n'est pas la même chose d'être un homme de désir ou un homme de pulsion. La pulsion, c'est la pulsion de l'un et ça n'est pas du tout accordé nécessairement avec le désir de l'autre et même l'autre, à ce niveau, on peut dire que son inexistence est vraiment saillante.

Le fantasme tel que Lacan en a fait la consistance clinique princeps es t le résultat d'une conjonction singulière du désir et de la pulsion, de l'inconscient et du ça, et donc c'est une consistance hybride, à cet égard et il a cherché des recours dans la topologie pour donner une idée de comment pouvaient se conjoindre des entités hétérogènes, s a référence étant en l'occurrence de la topologie, comment pouvaient se conjoindre des surfaces de genre différent, comment elles pouvaient s e coudre et comment à se découdre, on vo yait apparaître leurs structures différentes; entre un morceau de plan et une bande de Moebius, la typologie permet de coudre ça. Alors Lacan a trouvé à représenter cette consistance clinique hybride du fantasme au moyen de la typologie. Et quand il a définit la pas se, au niveau du fantasme, c'est précisément comme avec l'idée qu'on pouvait obtenir une disjonction. Ce n'est pas dire que la jouissance était absente de la première perspective de Lacan, celle des formations de l'inconscient, mais elle était essentiellement présente sous les espèces de sa négation, sous les espèces de sa négation signifiante en tant que castration. Si on veut trouver comment ça s'arrange dans cette perspective, on est forcé de dire: la castration est le nom de la jouissance en tant que niée, en tant que négativée, en tant que même rejetée dans le réel. Alors ce rejet, on peut le parler de différentes façons. On peut la parler, cette négativation, cette présence négativée de la jouissance, on peut en parler comme l'interdiction. Ça, c'est vraiment la version œdipienne. Le nom du père métaphorise le désir de la mère et quand Lacan l'amène à propos de la psychose, ce désir de la mère, c'est un des noms de la jouissance. On peut aussi en faire une interdiction purement signifiante, quand Lacan peut dire que la jouissance est interdite à qui parle comme tel, tout a l'opposé de ce qu'il formulera dans son séminaire Encore de la jouissance du bla bla bla. On peut dire aussi, on peut aussi parler de ce rejet en terme de forclusion de la jouissance, ou d'ex-sistence de la jouissance. C'est le même. Au fond Lacan avait idée que la jouissance n'entrait en jeu que sous sa forme négative jusqu'à ce que s'impose tout de même la nécessité de trouver à designer une jouissance positive ou bien que ce soit la jouissance avant l'interdiction ou que ce soit celle qui reste après.

Cette jouissance positive, dans cet ordre, il l'a désignée par un grand phi Ф, par un signifiant qui ne supporte pas le moins, tel qu'il en définissait l'usage, ou bien par petit a, c'est-à-dire par une lettre qui n'est pas un signifiant et qui était en quelque sort e une positivité récupérée, mais une positivité puisque Lacan, dans son enseignement, introduisait ce petit a comme bouchon de la castration marquée moins phi.

a
__
(-φ)


À la recherche donc, sur le fond d'une négativation de la jouissance, la présence on peut dire, dans la marge, d'un signifiant qui ne serait pas négativable, le grand Phi Ф et puis un peu partout, suivant la castration, si je puis dire, comme son ombre, toujours prêt à – tout de même – à réintroduire une jouissance positive sous les espèce de petit a bouchon de moins phi. Mais on peut dire dominé par la négativation signifiante. Et donc, d'une façon générale, Lacan a traduit la formule de la passe c'est le débridage de ce bouchon (que j'ai écrit sur l'autre feuille), de façon à ce que se trouve disjoint moins phi et petit a.

Voilà au fond la disjonction très simple par laquelle Lacan donne la clé de ce qu'il appelle la traversée du fantasme. Et ce sont deux éléments hétérogènes, on peut dire que ce moins phi ressortit à l'inconscient et que le petit a, c'est cet objet dont Freud a découvert la fonction et dans les Trois essais sur la sexualité, et qui est mis en valeur dans la seconde topique à l'étage du ça.

Alors évidement, on voit que c 'était déjà un progrès sur le premier temps de son enseignement où, dis ons , la conclusion de l'analyse ne jouait que sur le moins phi (-φ) Lacan a d'abord conçu la conclusion de l'analyse comme une conclusion ontologique (si je puis dire), débouchant sur le manque à être, débouchant sur ce qu'il appelait l'horizon déshabité de l'être , en conclusion de son article sur la Direction la cure. Ou encore débouchant sur la division, la Spaltung du sujet c'est-à-dire encore son manque à être et donc sur un dernier mot qui est néant, qui est rien, et sa rhétorique a habillé cette conclusion ontologique et lui a donné une splendeur à laquelle je fais allusion sans essayer de vous en citer des morceaux ni de la reproduire ici.

Alors, le progrès de la traversée du fantasme est le suivant: il conserve l'idée de ce que j'appelais la conclusion ontologique, il a parlé à ce propos de désêtre et je me souviens comme ce terme à l'époque avait la propriété de stupéfier ses auditeurs alors que ce terme ne faisait que redire d'une autre façon ce que Lacan avait dit de façon plus poétique quand il parlait du manque à être ou de l'horizon déshabité de l'être. Quand il s'agit de la conclusion qu'il conserve, la conclusion appelée traversée du fantasme, nous conservons ce que Lacan a pu dire du désêtre et de la déflation du désir dans laquelle on aperçoit que le désir n'est qu'une métonymie du manque-à-être, une révélation, et c'est ça la révélation ontologique, c'est la révélation du désêtre, mais elle complétée, si je puis dire, d'une conclusion existentielle qui est marquée petit a et qui est une positivité de jouissance, qui est une jouissance instante, existente, qui attache le manque-à-être du sujet, qui l'attache à l'existence et si j'en vient maintenant au sinthome, que je vise avec cette rapide reconstruction, avec le sinthome on peut dire que on bascule du côté existentiel. D'où nous voyons maintenant le re lief de l'enseignement de Lacan, on s'aperçoit qu'on est passé du manque-à-être à cette conjonction du manque-à-être et à ce que j'appelais la conclusion existentielle et puis que décidément (... ?) avec la consistance clinique du sinthome, il bascule de l'autre côté.

Au fond, d'emblée Lacan avait admis que la vérité avait structure de fiction par rapport au réel, et il se satisfaisait que l'analyse se tienne au niveau de la structure de fiction et qu'il opère dans la fiction. Et au fond le mal était, parce que le mal même était au niveau de la fiction. C'est la même chose mais vue de l'autre côté qui advient ave le sinthome: le réel ex-siste à la fiction. Au regard du réel, la fiction est une vérité menteuse. Toutes ces affaires d'être, c'est-à-dire d'identifications et de désêtre sont, au regard du réel, une vérité menteuse parce qu'il y a une jouissance qui ne se laisse pas négativer. Il y a une jouissance qui n'est pas dans le registre ontologique qui est un registre de fiction. Et dès lors, on peut dire que jusqu'au sinthome, Lacan a toujours considéré le réel à partir du signifiant. Et s'il nous dirige ensuite dans son dernier enseignement, dans ce que nous en faisons depuis lors, c'et à considérer le signifiant à partir du réel. Voyez d'où Lacan est parti: l'inconscient est vérité. Et ça oriente la pratique dans le sens de l'interprétation jusqu'à ce que Lacan ait formulé, ait donné le privilège à la formulation «l'inconscient est savoir» et qu'il ait définit l'inconscient à partir du sujet supposé savoir.

Alors là aussi cette formulation, qui est contemporaine de ses constructions sur le fantasme, voyez comme cette expression elle-même, il y a quelque chose d'hybride dans cette définition. D'un côté, à définir l'inconscient comme savoir et non pas comme vérité, on met l'accent sur le fait que l'inconscient est fait de signifiants, de matériel signifiant, qu'on voit sortir au fur et à mesure que se poursuit l'analyse. Mais en même temps , le terme de supposition fait bien voir que nous restons dans l'ordre de la fiction ; c'est-à-dire ce savoir matériel néanmoins n'est pas réel, il a un statut de fiction comme celui que Lacan assignait à la vérité et donc si on voulait – il m'est arrivé souvent d'expliquer cette formule du suje t supposé savoir et de m'en servir – j'aperçois ici vraiment son caractère hybride et donc Lacan pouvait dire quedanslapasse,ilyaun évanouissement du sujet supposé savoir corrélatif du désêtre, que de la même façon qu'il y a désêtre il y a le dévoilement de l'inessentiel du sujet supposé savoir c'est-à-dire le dévoilement de la négation de cette essence et de ce sens du sujet supposé savoir.

Alors la bascule à laquelle Lacan n'a pas pu donner une expression à la mesure de la nouveauté que cela comportait puisque, finalement, il ne l'a dit absolument en clair qu'une seule fois, entre parenthèses. La bascule, c'est de considérer l'inconscient comme réel, c'est: l'inconscient est réel. Et ça, c'est un nouveau concept de l'inconscient, dirais-je, un concept qui inclut le ça, pour le dire de la façon la plus simple. Il se sert désormais du terme d'inconscient pour unifier l'inconscient et le ça, et c'est pourquoi, par exemple, il pouvait dire dans Télévision que le nœud que un symptôme, c'est un nœud de signifiants donc pas le retour d'une vérité refoulée et qu'il est fait d'un nœud qui se construit – je le cite – réellement – voyez pages Autres écrits (pages 516, 517) d'un nœud qui se construit réellement à aire chaîne de la matière signifiante, chaîne non de sens mais de jouis-sens. Dieu sait si j'ai déjà épinglé ce terme de jouis -sens. Mais si je le traduis en terme freudien, c'est la conjonction de l'inconscient et du ça. Et l'énorme, c'est que Lacan pouvait déjà dire dans Télévision – je le cite – c'est le réel qui permet de dénouer le symptôme.

Je me demande comment on est passé si vite là-dessus parce que c'est énorme, l'idée qu'on puisse opérer avec le réel, que le réel puisse être un moyen de l'opération analytique. Et donc cette même bascule se c onstate, cette même bascule qui est là marquée par l'implication décidée de la pulsion dans le symptôme se constate aussi quand Lacan disons efface progressivement le terme de sujet qui appartenait par excellence à l'ordre signifiant, et le remplace, voudrait le remplacer par le terme de parlêtre. Évidemment, le sujet est disjoint de la pulsion tandis que le parlêtre inclut le corps et il dit: voilà le nom qui remplacera celui d'inconscient. Donc au fond tantôt Lacan dit l'inconscient est réel ou tantôt – comme l'inconscient réel c'est vraiment autre chose que l'inconscient freudien, eh bien il propose à l'occasion de le remplacer – sans aller jusqu'au bout bien entendu – il évoque qu'on pourrait le remplacer par le terme de parlêtre incluant le corps et c'est cohérent avec la notion du jouis- sens, que il n'y a pas de sens qui aille sans jouissance et donc il n'y a pas de signifiant, il n'y a pas de désir qui ne soit connecté à la pulsion, etc., et la racine de l'Autre c'est le Un. Vous voyez à travers – là je parcoure plusieurs années du dernier enseignement de Lacan, mais c'est comme une nébuleuse et nous trouvons là les indices qui nous permettent de voir dans quelle direction pointe sa dernière perspective.

Alors le parlêtre c'est celui qui de parler, en quelque sorte superpose un être au corps qu'il a, il superpose un être à l'avoir et son avoir essentiel c'est le corps. Le parlêtre c'est aussi le «n'a qu'un corps»; si je puis dire. Alors dans tout ça; il y a une dévalorisation du signifiant, de la valeur de vérité et l'idée qui modère l'idée de la puissance signifiante. Il considérait, par exemple, la façon énigmatique dont Lacan entame son séminaire du sinthome. Et je vais essayer de faire sens de l'apologue qu'il présente au début puisque il évoque la création divine, la création dite divine, et l'histoire des noms qu'il serait demandé à Adam de donner aux espèces animales et ce qu'il met en valeur c'est: la bactérie n'est pas nommée. Et bien ça, ça veut dire qu'il y a des existences qui n'ont pas des noms, qui n'ont pas de signifiants et qui n'en sont pas moins du réel. C'est Lacan qui avait exalté dans son enseignement la puissance créationniste du signifiant. Bien entendu, puisque que le signifiant est ce qui accouc he d'entités qui ont structure de fiction. Et donc Lacan exaltait au contraire el pouvoir de création de signifiant qui s'exerce ex nihilo, à partir de rien. Là où il n'y a rien, le signifiant fait être quelque chose. Et en particulier, il fait être la vérité. Et bien nous avons ici l'envers de décor, nous avons au contraire quelque chose qui a existence sous les humbles espèces de la bactérie et à quoi on ne daigne pas accorder la nomination.

Et on a cru d'ailleurs, à cette date, que Lacan exaltait la nomination, la fonction de la nomination alors que, tout au contraire, il évoque la nomination pour montrer qu'elle est sa distance avec le réel. C'est dans ce contexte qu'il peut dire que la création dite divine se redouble de la parlotte du parlêtre, ce qui implique, ce qui impliquerait, parce que nous sommes là au niveau d'un apologue, qu'il y a d'abord le réel et que s'ajoute ensuite, se surajoute le signifiant et que donc cet apologue de début de Séminaire du Sinthome illustre la primarité du réel; et c'est avec le signifiant qui commencent les embrouilles, les embrouilles du vrai, les embrouilles du désir, les embrouilles de l'interdit, les embrouilles de l'Œdipe , parce qu 'à la racine, le signifiant vient percuter le réel, il vient percuter les corps. Et chez le parlêtre, ce choc initial, ce traumatisme introduit une faille qui est aussi bien le phallus, qui est aussi bien la faute, le péché ou, dit Lacan - en prenant la première syllabe de sinthome, sin-en anglais le Sinn, le péché. Et la faille, cette faille initiale tend à s'agrandir toujours, sauf, dit-il, à subir le cesse de la castration. Et donc ce qu'il appelle ici castration, c'est ce qui ferait cesser le sinthome, c'est ce qui ferait que ça puisse s 'écrire dans un discours ce qui ne sera pas du semblant mais qui serait du réel. C'est le nouveau sens de la castration: ce qui fait cesser les embrouilles du sens. En effet ici Lacan introduit, Lacan qui avait célébré la fonction de la parole, introduit l'instance de l'écriture comme essentielle à la pratique d'analytique. La différence est que la parole porte de sens tandis que l'écriture rejoint le non-sens. Et c'est pourquoi il faut radicalement distinguer le signifiant et la lettre. Le signifiant effectue le signifié tandis que la lettre est matière. Et donc Lacan nous dirige dans ce sens d'un certain forçage des limite s de l'analyse. Dans le champ du langage, il y a plus que la fonction de la parole, il y a l'instance de l'écriture. Et Lacan sait si bien que c'est un forçage qu'il n'hésite pas ici, pas avant, c'est avec le symptôme qu'il s'affirme comme hérétique dans psychanalyse, en se préposant d'être hérétique de la bonne façon. Mais sans doute a-t-il été discret la dessus puisque hérétique, on l'a dit déjà pendant vingt ans, dès qu'il a commencé à ouvrir la bouche. Eh bien tout le temps qu'on le disait hérétique, Lacan, lui, se considérait comme freudien. Et c'est ici, en effet, que lui-même évoque son hérésie. Quelle est bonne façon d'être hérétique dans la pratique psychanalyse? Il en donne la formule qui est à méditer: la bonne façon est celle qui, d'avoir bien reconnu la nature du sinthome, ne se prive pas d'en user logiquement c'est-à-dire d'en user jusqu'à atteindre son réel au bout de quoi il n'a plus soif. (page quinze du Séminaire du Sinthome).

C'est un appel à la nature de sinthome dont il s'agit d'atteindre le réel. Il ne s'agit pas d'atteindre sa vérité mais c'est la notion que le sinthome est du réel, que ce n'est pas un retour du refoulé, que ça ne s'apaise pas avec de la vérité, que ça ne s'apaise pas avec du sens, comme Freud s'en était bien aperçu en ayant sur les bras les restes qu'il appelait les restes symptomatiques de ses patients; et c'est ce qui le conduisait à dire: bon, après un petit temps de latence, on attend cinq ans et puis on s'y remet et puis il y aura des restes symptomatiques. Alors Lacan passe à la limite en disant: il y aura toujours des restes symptomatiques parce qu'il est de la nature de la jouissance de résister au sens. Il a une jouissance qui tient au corps, qui se produit dans le corps. Alors on peut dire évidemment, ça se produit aussi dans la pensée, on peut penser au symptôme obsessionnel, c'est un symptôme dérivé, si j'ai le temps, j'y viendrai plus tard, on a parlé de ça justement à Montpellier. Le symptôme est du réel et il appelle du sens, il suscite du sens, il susc ite l'interprétation aussi bien du patient que de analyste. Et c'est à ça que Freud, dans son orthodoxie, a succombé et c'est ce qu'il fait qu'il a découvert l'inconscient parce que les hystériques, du sens, elles lui en ont donné a ras bord, en veux-tu, en voilà! Bien sûr qu'il faisait des séances longues, qui étaient encore trop courtes pour lui, si je puis dire, parce qu'il attendait la suite. Elles devaient lui dire: non non; ça, je vous le dirai demain.

C'est là où Lacan... j'essaye de donner de l'éclat à cette hérésie. L'hérésie, c'est cette mise à distance du sens s'agissant du s inthome et au fond autant la psychanalyse que Lacan implique comme orthodoxe fourni t du sens, autant cette psychanalyse hérétique sèvre le patient de sens. C'est, au moins, une pratique qui correspond au temps de l'outrepass e ou l'analyste à affaire aux restes symptomatiques quand le sujet ne s'en est pas satisfait. Et à ce moment là, l'analyse devient, en effet, un sevrage de sens. Et Lacan était tellement convaincu que le sens, alors, pouvait être peu indiqué ou dangereux, que lui a été arrivé – il lui est arrivé une fois – d'évoquer la nécessité d'une contre psychanalyse après fait une analyse. La contre psychanalyse, étant entendu qu'elle aurait visé justement à ce nettoyage du sens que j'évoque ici.

Alors il parle d'usage logique du symptôme et il s'agit, en effet, d'une pratique orientée par le mode logique. Il ne faut pas s'imaginer que le hors sens, c'est la nuit noire. Quand Lacan situe le sinthome comme du réel hors sens, c'est au sens où la logique procède hors sens, qu'elle formalise, qu'elle pose ses axiomes et qu'elle déduit hors sens c'est-à-dire en opérant dans un champ du langage nettoyé de la signification. Vous trouvez ça déjà dans l'écrit de Lacan qui s'appelle L'Étourdit, la connexion de la logique et du réel quand Lacan écrit: la logique est la science du réel. Ces affinités de la logique et du réel sont à l'oppos é des affinité s de la philosophie et de l'être. Le hors sens qu'il évoque, c'est le hors sens qui est le résultat de nettoyage du champ dont on exclut la signification pour manier la lettre. Cet hors sens, donc, ce n'est pas simplement: on se cogne partout, on ne voit rien, on ne peut rien en dire mais il a y, au fond, possibilité d'une articulation. Que Lacan, dans son tout tout dernier enseignement, soit venu à douter de cette articulation elle-même, c'est un autre chapitre. Ici, je me tiens à ce que ça me suggère de la deontoligation la pratique analytique qui suppose – l'hérésie, ça n'est pas de quitte r le champ du langage, c'est d'y demeurer, mais en se réglant sur sa partie matérielle, c'est-à-dire sur la lettre au lieu de l'être. Il est été arrivé à Lacan de jouer au contraire sur les affinités de la lettre et de l'être, sur les assonances; dans son article qui s'appelle L'instance de la lettre, il en joue. Mais c'est tout au contraire, dans la période de sa réflexion que j'évoque, il passe par le mot lituraterre – littérature transformé comme je l'ai dit, pour faire valoir la lettre comme litura, comme déchet et donc pour l'arracher à ses affinités avec l'être. Le réel du sinthome que Lacan nous propose dans cette phrase d'atteindre, dis ons que c'est la pure percussion du corps par le signifiant, par la parole. C'est ainsi d'ailleurs que Lacan définit à cette occasion el s pulsions comme l'écho dans le corps qu'il y a un dire.

Ce thème de la résonance est familier à Lacan puisque dès son premier texte Fonction et change de parole et du langage il l'introduit, et d'ailleurs comme le titre de sa troisième et dernière partie page deux cent quatre vingt neuf des Écrits «Les résonances de l'interprétation». La notion de résonance est là d'emblée mais au début de l'enseignement de Lacan, elle est pris e dans une poétique du langage. Alors qu'ici, il s'agit d'un usage logique. La percussion, elle nécessite pour retrouver la percussion initiale il s'agit d'un usage logique qui serait capable de tarir le sens, de couper de souffle. Lacan l'évoque à propos de Joyce dont il dit qu'il coupe le souffle du réel, qu'il coupe le souffle du rêve de la littérature. avec son Finnegans wake qui est écrit dans une langue personnelle, qui joue de toutes les assonances et il dit que c'est à cette occasion que Joyce a mis au jour le sens du symptôme littéraire.

Autrement dit la littérature rêve et Joyce, avec son roman d'assonance, montre de quoi elle est fait matériellement. Et en nous montrant de quoi elle est faite matériellement, il la réveille. Il la réveille pour qu'il finisse, pense Lacan. La littérature ne pouvait se soutenir que de son rêve, que de ne pas savoir de quoi elle était faite. Et bien ce qui est à l'horizon que dessine Lacan – j'irai jusque là, moi je le situe dans l'espace de l'outrepasse – c'est de mettre en jour le sens du symptôme psychanalytique. C'est-à-dire de quoi est fait une psychanalyse. C'est ça qui vient au premier plan dans l'outrepas se, de quoi est fait votre attachement à la psychanalyse? À la jouissance de la psychanalyse.

La aussi il y a rêve qui implique, qui appelle un réveil qui ne se fait pas sur modèle de 'leffet de vérité. Pour cela, il faut suivre Lacan dans ce qu'il nous indique, et c'est là-dessus que convergeait le séminaire du Sinthome, je l'ai montré à Montpellier, dans une atmosphère de rigolade qui n'est pas la notre ici! J'ai montré que la pratique que Lacan nous indique où qu'il peut nous permettre d'inventer, où qu'il peut nous permettre de théoriser quand c'est la notre, passe par une désublimation qui n'épargne pas la théorie psychanalytique et qui décape sa pratique de son orientation vers la vérité et même de son adoration de la vérité, une pratique qui vise au serrage du réel du symptôme. Au fond nous avons eu l'exemple d'emblée à Montpellier a propos de – j'avais cueilli comme ça des phrases cliniques de Lacan et j'avais obtenu celle-là d'abord – arracher l'obsessionnel à l'emprise de regard. Ça ne va pas de soi qu'on puisse dire que ce soit là l'essentiel. On dirait dans psychanalyse qu'il s'agit de l'idéal du moi, de l'instance qui surveille et qui juge. On évoquerait l'Homme aux rats qui, à un moment crucial de sa jouissance, s'en va s'ouvrir la porte pour voir si son père n'est pas là. Au fond, ce que Lacan indique au contraire, c'est que le père, le grand I de l'idéal du moi, au fond ce sont des fictions. Ce sont des fictions qui permettent de méconnaître ce qu'il y a à la racine qui est la présence de regard. Le réel de symptôme obsessionnel, ce n'est pas le père. Ce n'est pas l'idéal du mois. Le réel de symptôme obsessionnel que Lacan nous invite à atteindre, c'est le regard. L'idéal et le père sont dérivés du regard. C'est dans ce sens que Lacan peut dire que la vérité est sœur de la jouissance, sœur cadette, c'est-à-dire qu'elle vient après et qu'il y a d'abord la jouissance, ce qui vraiment inverse l'ordre sublimatoire dans lequel l'orthodoxie psychanalytique, y compris la lacanienne, nous a appris à penser.

La théorie analytique, c'est une sublimation de sens. Et c'est pourquoi Lacan faisait appel à une pratique sans vérité. On a rencontré ça dans son tout dernier enseignement et je vois mieux maintenant ce que ça veut dire.

Une pratique sans vérité, c'est une pratique sans la fiction de la vérité, sans la fiction des univers aux, c'est une pratique désublimée. Alors quand on proposait à la fin de l'analyse la sublimation comme idéal, voire devenir écrivain, devenir artiste, c'était aussi au nom d'une idée de l'art que Lacan conteste dans son séminaire du Sinthome en montrant que l'art, à travers exemple de Joyce, il montre précisément que l'art a sa racine dans son réel et lui-même de l'ordre du sinthome. C'est la idée que Lacan avait de Finnegans wake que Joyce avait l'écrit pour lui-même et que el fait qu'il l'ait publié n'a llait pas de soi et que c'est parce qu'il avait des mauvaises intentions, c'est parce qu'il avait l'intention de couper le sifflet aux autres écrivains, et d'en finir avec la littérature. Qu'est-ce que ça veut dire ça? C'est que Lacan ici nous invite à traiter l'œuvre d'art elle-même, cette œuvre écrite, à partir de la pulsion, à partir, si je puis dire, de la pulsion scriptuaire. Qu'elle est à entendre dans l'auto-érotisme du parlêtre. De la même façon, c'est dans ce Séminaire que Lacan réduit, désublimise le père en disant que le père n'est qu'un symptôme. Et c'est pourquoi il parle de perversion. Il a de l'ironie bien sûr, puisque le père est suppos é, dans la psychanalyse orthodoxe, être le support de normal et que Lacan fait entendre ce qu'il comporte de pathologique. Mais ce aussi dire que du père il n'y a que des versions, que l'essence qu'on appelle le père et précisément le nom du père, qui a été isolé par un certain orthodoxe qui s'appelait Lacan Jaques, eh bien que précisément le père n'existait pas. Dans la pratique de la psychanalyse il n'existe que des pères, singuliers. Au fond la désublimation, la chute des idéaux et des universaux, elle a commenc é pour Lacan a partir de la sexualité féminine, lorsqu'il a pu dire: La femme n'existe pas, il y a des femmes, eh bien, de proche en proche, il l'a étendu a toutes les catégories et en particulier de celle du père. Mais c'est dans le même esprit qu'il peut dire que «le vrai – c'est aussi une phrase que j'avais proposée à Montpellier, de Lacan – le vrai, ça fait plaisir» et qui, bien sûr, fait déchoir le vrai de sa qualité d'effe t de vérité pour montrer en quoi il est une affaire de libido. C'est la tension majeure de notre pratique entre logique et libido. Dans les dernières phrases que j'avais fait commenter, il y a celle-ci de Lacan et qui s'entend mieux sur le fond différence entre la psychanalyse orthodoxe et l'hérétique.

«L'analyse, dit-il, est une réponse tout spécialement conne, à une énigme». Et, bien entendu, c'est la psychanalyse comme orthodoxe qu'il vise là. Elle est toute spécialement conne dans son esprit – voyez là-bas, ça fait rire tout le monde, ici personne, parce que nous sommes des austères – c'est que précisément, l'analyse orthodoxe essaye de rép ondre à l'énigme sexuelle par un effet de vérité, par un: que la lumière soit, par une élucidation, alors qu'il s'agit, au contraire, d'atteindre ce que la jouissance comporte d'opacité irréductible et c'est àl ce que vise l'hérésie lacanienne.

On a pu croire que l'Autre, c'était l'Autre de la parole, l'Autre du désir et Lacan a construit son grave sur cet Autre, et il a même pu situer à côté des formations de l'inconscient le fantasme de la traverser. Évidement, on opère dans un tout autre cadre quand on admet que l'Autre, c'est le corps, qui n'est pas ordonné au désir mais qu'il est ordonné à sa propre jouissance. Que ce réel, Lacan a voulu lui donner la forme boroméenne, on peut en prendre acte, il n'empêche que au cœur, là ou se coincent les cercles, le ronds boroméens, il y a toujours à placer un prélèvement corporel et je vous en ai donné un exemple avec ce regard dont j'ai montré à Montpellier comment on pouvait le retrouver dans nos différentes structures cliniques.

Ce sera publié, Montpellier, les travaux de mes collègues, la discussion et donc n'en dirai pas davantage aujourd'hui en vous donnant rendez-vous à la semaine prochaine.


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